23 juillet 2007

Lilys : Eccsame the photon band


Eccsame the photon band de Lilys

Sortie : 1994
Produit par Kurt Heasley
Label : spinART


Avec Lilys, on plonge dans une ambiance très particulière, bizarre et troublante. Est-ce du à l'insuccès chronique et injuste de ce groupe de l'ombre ? A l'esthétisme arty du label spinART ? A l'austérité de son leader Kurt Heasley ? Toujours est-il que sa musique dégage une atmosphère vaporeuse, raffinée et un peu perdue.
Le groupe à géométrie variable se propose de mener un voyage dans l'expérimentation planante, en jouant une musique minimaliste, aérienne et envoûtante. La formation américaine s'inscrit dans le courant shoegaze mais en bout de course, une fois que le chronomètre est arrêté. Plus besoin de faire du tape-à-l'œil toutes guitares dehors comme sur le premier album, paru deux ans plus tôt, Lilys sait qu'il ne convaincra personne, surtout pas lui-même.
Les titres s'étirent, ponctués de plages sonores de quelques secondes et les voix se font souffles tranquilles alors que l'instrumentation entre rythmique molle et évaporation gazeuse, plonge dans une atmosphère particulière.
On n'y rentre d'ailleurs pas si facilement et on peut être vite désappointé mais dès qu'on est dedans, on n'a plus qu'à fermer les yeux.
Inclassables, hors du temps, intellectuelles, on navigue dans des sphères qui semblent être ceux d'un autre monde. Ce décalage déroutant met mal à l'aise. On ne sait si le ton est pessimiste ou non. On a l'impression que ça joue dans le vide, pour rien, ni pour personne. Une sorte d'enregistrement qui n'aurait aucune prise sur la réalité, puisque visitant des dimensions parallèles. C'est avec ce trouble phobique que le groupe entraînera l'auditeur dans un voyage inquiétant mais irrésistible sur des courants brumeux et trainards.
Maîtrisant aussi bien les chansons courtes expérimentales ("Kodiac (reprise)") que les longs étirements tendus et ébouriffants ("FBI and their toronto transmitters" et ses relents psychédéliques), Lilys joue avec l'art en le déformant, en le noircissant et en le retournant dans tous les sens pour. La voix de Kurt Ralske se fait soufflante, plus affirmée qu'auparavant, chaude, discrète et délicieusement tendancieuse.
Eccsame the photon band est un disque étrange qui intrigue à sa millième écoute comme à la première, par sa clarté mélodique ("Hubble"), ses pièges nonchalant ("Radiotricity" et son riff inquiétant) et la complexité sournoise de ses arrangements ("High writer at home" et ses guitares tremblotantes ou "Overlit canyon (the obscured wingtip memoir)"). La musique est dilatée à l'extrême, tordue en un Noeud de Moebius, subissant le ralentissement du tempo, pour prendre le temps de s'arrêter là où d'habitude bon nombre passent leur chemin. Décalé, ballotté, transporté, on cherche en vain la lumière au delà de ce rêve inconcevable.

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