2 décembre 2015

Fiche artiste de Plow

Plow

Groupe de Baltimore dans la Maryland. Composé de Thomas Moore à la guitare et au chant, Sei Petersen à la guitare également, Laura Trusell à la basse et Chris Batworth. Deux albums sur Hat Factory, mythique label indépendant qui a soutenu à bout de bras les groupes de la ville (Big Heifer, Palentine, Spastic Cracker).

3 novembre 2015

Fiche artiste de Soon

Soon

Dans les années 90, Mercury a monté une filiale, Black Out, pour promouvoir le nouveau rock alternatif italien. Le groupe de la chanteuse Odette Di Maio a pu en bénéficier et sortir ainsi deux albums de pop rafraîchissante et inoffensive, apparemment calibrée pour la radio mais en réalité (du moins pour le premier) influencée par le rock alternatif de The Breeders, Lush ou My Bloody Valentine. Sans réel succès (malgré quelques apparitions sur MTV). Trop subversif encore ?

8 septembre 2015

The Darling Buds : Erotica

Erotica de The Darling Buds

Sortie : 1992
Produit par Stephen Street
Label : Epic

Pour le troisième album, toujours sur la major appartenant à Sony, on retrouve les guitares, mais cette fois-ci le son est plus fort et bruyant. La pochette reprend les codes du shoegaze, comme une leçon d’école. Et la voix d’Andrea Lewis se fait sirupeuse. Ce n’est pas de la copie ou de la récupération mais juste une envie de se réinventer encore une fois. Andrea se justifie : « on a évolué depuis les huit ans qu’on est ensemble et on a pris pas mal d’influences de divers groupes. »[i]
Cet album, plutôt réussi, est lumineux. The Darling Buds a toujours été un groupe à guitare. Et quand on y réfléchit, finalement, sur cet album, le groupe ne se renie pas, au contraire. Leur son est plus ample, plus puissant, plus carré. Andrea confirme : « On a toujours été comme ça [avec un côté plus méchant et dur]. On a été laissé en autonomie pour cet album alors on a pu faire ce qu’on voulait. En concert, on sonne plus fort. On a gardé le côté mélodique mais on a clairement durci le son des guitares. On n’est pas juste un groupe pop. »[ii] L'écriture est au top, assurée et facile d'accès (pour du shoegaze), comme sur « Wave » ou le single « Sure Thing ». C’est même une excellente porte d’entrée pour le curieux qui souhaiterait se faire une idée du mouvement sans être rebuté. Les guitares sont certes dignes de My Bloody Valentine, Lush ou The Charlottes mais les chansons ne sont pas du tout agressives, grâce à une voix douce qui se superpose parfaitement au bruit ambiant, sans être obligée de se donner une contenance grave ou solennelle. Car c’est de la pop avant tout, qui ne se prend pas au sérieux et met l’accent sur les belles mélodies, faciles à retenir. Harley explique : « Andrea a des goûts très larges en matière de musique, ça peut aller de Ride à 10 000 Maniacs »[iii]. L’intéressée ne nie pas les influences, au contraire : « Il faut faire le tri parmi [les groupes de la scène Thames Valley] mais Lush, ils sont cool. On a demandé à faire une tournée avec eux. Ils n’ont pas l’air de trop galérer. Je pense que personne ne les attendait ! »[iv]. La seule différence, c'est que The Darling Buds est peut-être plus optimiste.
L’album garde sa cohérence et s’autorise même quelques prises de risques, comme la ballade « Gently Fall », passée au mixer, « Off the mind », estampillé The Cure ou « One things to another », véritable hommage au Loveless de My Bloody Valentine, avec sa guitare sèche, ses nappes glissantes comme si la bande magnétique avait chauffée au soleil et ses « ouhouhouh » répétitifs.
On retient des titres qui sont d'une richesse incroyable, ne conservant du shoegaze que le côté tourbillonnant. Erotica devient alors un album d'une énergie folle, une gerbe de lumière, un éclat.
Il aurait mérité un autre regard, une appréciation moins connotée, si on avait su à l'époque se focaliser sur la qualité d'écriture du groupe, toujours présente... 



[i] Interview d’Andrea Lewis par Dom Gourlay, sur Drowned in Sound, 21 aout 2015, [en ligne] http://drownedinsound.com/in_depth/4149263-we-treat-every-gig-as-if-its-our-last-one---dis-meets-the-darling-buds
[ii] Andrea Lewis cité par Mark Sutherland, sur Lime Lizard, septembre 1992, [en ligne] http://notsorted.tripod.com/DBarticles.html
[iii] Geraint « Harley » Farr sur White Limonade, date inconnue (1992 ?), [en ligne]  http://www.whitelemonade.net/one/bud-wiser
[iv] Andrea Lewis sur White Limonade, op. cit.


4 septembre 2015

Fiche artiste de 13th Hole

13th Hole

En 1992, exceptionnellement, les Transmusicales de Rennes font toute une programmation autour du label Rosebud, alors maison de disque locale et indépendante qui commençait à pointer le bout de son nez. Les dirigeants, souhaitant privilégier l'éclectisme, avaient toujours refusé d'accorder la primeur à des labels en particuliers, surtout parisien, mais ils n'ont su refuser lorsqu'ils ont vu ce label rennais metre un sacré coup de pied dans la fourmillère. Ils ont donc programmé 13th Hole (noisy-pop), Chelsea (twee-pop) et Katerine (du n'importe quoi) tout un vendredi après-midi. Pour promouvoir cet événement, on peut voir 13th Hole livrer une prestation sur la chaîne télé locale. Le résultats est significatif : un trio français qui ne faisait rien comme personne ! Une chanteuse hagarde qui regarde en l'air plutôt que la camera, deux garçons flanquées de leurs guitares et amoureux des distorsions, cet absence de posture détonne dans le plat paysage français des années 90. C'est que 13th Hole est en réalité amoureux de ce qui vient d'ailleurs, à commencer par My Bloody Valentine et (surtout) Sonic Youth. Donc inutile de dire qu'avec eux ça déménage ! Guitares noisy à tous les étages, voix dépassées, rythme à 100 à l'heure, le groupe mené par le rennais Stephan Le Scarnouec et l'italienne Isa Valenti font vriller les têtes !

22 août 2015

Plow : Plow

Plow

Date : 1993
Production : Tony French
Label : Hat Factory

Le premier album de ce groupe méconnu de Baltimore possède encore un petit côté lo-fi. Si les guitares saturées sont bien présentes, comme pouvait le faire Ride lors de ses premiers singles ("Broken Nose"), ou Sweet Jesus pour le côté harassant, on devine néanmoins l'influence de groupes comme Sebadoh ou Pavement. D'une part parce que les distorsions n'hésitent pas à sortir des sentiers battus, avec une petite tendance loufoque ou par dessus la jambe ("I'm on Mars"). D'autre part dans le chant. Celui de Thomas Moore, leader du groupe, est bien évidemment adoucie, n'hésitant pas à rallonger ses vocalises et ses voyelles, mais lorsque les paroles sont plus audibles, le ton est plus franc, presque s'il parlait, avant de s'autoriser des montées saugrenus dans les tons plus aigus, quitte à frôler le chant faux, comme un Stephen Malkmus (superbe "Chainsaw Glide" ou "My Sky"). 
Malgré tout les nappes de guitares sont omniprésentes. Et peuvent servir, en particulier lors des intros, à sortir des riffs venus du ciel, bien aidés par la basse de Laura ou par des guitares sèches. "Satellite" honora la nonchalance, tandis que "The Creeper" démarre presque comme un morceau traditionnel de rock-folk américain. 
On obtient ainsi un mélange savoureux entre la négligence débraillée du lo-fi et le maniérisme obsessionnel du shoegaze. Avant de mieux maîtriser encore leur son sur leur deuxième album, Plow aura préparé le terrain à des groupes comme Lenola.

18 juin 2015

Plow : Ice Cream Flares and Rocket Sounds

Ice Cream Flares and Rocket Sounds de Plow

Date : 1996
Production : Tony French
Label : Hat Factory

Ce groupe méconnu mais rodé au circuit indépendant (salle d’étudiants, bars et autres prestations dans des petites salles) est un excellent exemple pour connaître ce qui faisait tout le charme de ce mouvement américain qui porta sans doute mieux que personne, toute la contradiction à vouloir être sensible dans un monde de brutes. Plow récupère toutes les influences héritées de ses idoles (Ride en tête), prête une oreille attentive au mouvement emo (Sunny Day Real Estate par exemple), n’oublie pas le gros son alternatif (Foo Fighters ou The Posies), mélange le tout et livre alors cet album étonnant qui livre la traduction américaine d’un style avant tout anglais. Aucun raté ne figure sur cet album et c'est un miracle que d'entendre toutes ces mélodies sublimes portées par une batterie pressante, des guitares énormes et un rythme soutenu. Le chant hésite entre chant clair et voix adoucie par l'émotion, qui ici transpire de partout. Tout est décuplé au cent mille, Plow ne s'embarrasse de rien, surtout pas de l’intellectualisme qu’on a parfois reproché au shoegaze, il jette à tout va : intro délicieuse (« Fall »), riffs légèrement saturés qui ne s’arrêtent jamais, sauf pour quelques passages mid-tempo (« Streamlined Swingset »), rythmique fracassante (« Your eyes are drugs ») ou chant loin d’être androgyne ou lyrique mais d’une douceur incroyable et d’une texture savoureuse. Parfois les guitares sont d’une lourdeur étonnante et rappellent des groupes mythiques comme Nirvana ou les Smashing Pumpkins (la fin de « Meteor »)
L'urgence est particulièrement de mise, comme si on avait peur d'oublier ce qu'on avait à transmettre, comme si l’énergie brûlait le corps et qu'il fallait tout sortir pour éviter la consumation, sans pour autant oublier coûte que coûte un attrait stylistique pour les mélodies, qui flirtent souvent le haut vol (le crescendo d’ouverture « Rosebud » ou « Velveeta » et son riff coup de poing). 
On est plongé directement dans le monde tourbillonnant des musiciens, tourbillon de romantisme, espoir, tendresse, mélancolie, le tout s'entrechoquant à grande vitesse. Tout est palpable, là, devant nous, en des titres percutants, parfois très longs mais d'une authenticité rare, incorruptible presque. Sans se rendre compte, on transite de moments calmes, chaloupées, à des instants plus explosifs. A l’instar de « Whale songs for frogs » qui représente une sacrée prouesse. L’émotion est à fleur de peau, notamment avec ces voix légères (on dirait Fudge), son rythme emo et ses guitares grunge, avant d’enchaîner sur une longue escapade à base de guitares saturées et de déluges mélodiques, puis de se terminer sur une retombée plus flegmatique mais plus gracieuse, que n’aurait pas renié Billy Corgan. Et l'on respire. 
S'identifier à ces gamins, un peu insouciants, mais tellement volontaires, est évident, presque naturel, tant cette musique garde encore toute sa fougue, son charme et sa jeunesse.

8 juin 2015

Fiche artiste de Lorelei

Lorelei

Groupe de Washington de l'écurie Slumberland Records, adepte d'un shoegaze inspiré par le math-rock et le post-rock.

16 mai 2015

13th Hole : Headache

Headache de 13th Hole

Date : 1992
Production : Hervé Jégadin
Label : Rosebud

Neuf titres sous-produits, façon punk, façon pop, c’est selon, avec une sorte d’étrangeté qui les détache du lot. Certes, les guitares sont tellement distordues qu’elles vrillent la tête (« Face »), mais il existe dans cette musique, un sens du décalage, une folie, une volonté de sortir des schémas couplet-refrain habituel pour proposer de superbes mélodies venant de nulle part. Il s’y cache beaucoup de surprises qui deviennent alors de véritables délices, comme le magnifique « Mrs Peel ».
Les riffs sont tourbillonnant, le tempo est rapide, le son presque noise, le chant quasiment inaudible et pourtant très doux, la structure est éclatée, les distorsions sont légions. Et la très belle voix mutine et légère d’Isa n’est pas étrangère dans le pouvoir d’attraction qu’exerce 13th Hole. Surtout lorsqu’elle scande des paroles sibyllines issues des textes de Lovecraft (« Crazy », « City ») ! Ou lorsqu’elle gueule comme une furie (« Stand in line »).
On a souvent comparé ce groupe français à Sonic Youth, et il y a un peu de vrai tant ça va très vite sans regarder en arrière. Surtout sur « He is ill », acéré, écorchant. La batterie sonne tellement fort et vite que l'on a l'impression que tout va s'écrouler autour d'eux. Et les guitares s'emballent parfois dans des discours alambiquées et frénétiques qui rappellent le mythique "Daydream Nation". Mais il y a toujours de la douceur, qui ici, devient presque une forme de perversité, façon My Bloody Valentine. 
Les saturations énormes de « Wave », saupoudré d’un chant aussi félin qu’angélique, s’inscrit dans un style shoegaze passé au mixeur. Quant à « City », ce n’est qu’une déferlante de distorsions à n’en plus finir, et c’est à peine si on entend la voix d’Isa au milieu de ce vacarme infernal. 

15 mai 2015

Fiche artiste de Readymade

Readymade

Ils sont rares les groupes canadiens de shoegaze. Readymade est presque une curiosité rien que pour cela. Car avec leur premier album, ils réinventent un genre qui n'existe quasiment pas dans leur pays. Composé de Kevin Hilts, Arno Veimer et Johnny Fontane.

23 avril 2015

Fiche artiste de Astreal

Astreal

Sans doute le groupe le plus représentatif de la scène indépendante de Singapoure. Anciennement Breed, il change de nom et de style lorsque arrive la chanteuse Melissa Lim en 1992. A partir de ce moment-là, avec Muhammad Alkhatib (guitare), Will Da Silva (basse) et son frère Alwin Lim (batterie), ils décident de reprendre le style de leurs groupes favoris : My Bloody Valentine, Lush ou encore Curve. Cela durera quelques temps jusqu'au départ de Melissa en 1999.
William prend alors la guitare tandis qu'il recrute Ginette Chittick au chant. Les lives deviennent de plus en plus énormes et expérimentaux. Mais le groupe souhaite s'enfoncer dans le post-rock et l'électro pour aller au bout de leur démarche, ce qui lassera William. Divers départs et remplacements durant le début des années 2000 mettra un coup d'arrêt au groupe. Qui reprendra ses activités en 2017 pour le plus grand plaisir de leurs fans.

16 avril 2015

Fiche artiste de Teen Love Sex Doll

Teen Love Sex Doll

Chouchouté par Ivo Heger, un des parrains du shoegaze en République Tchèque, qui a décidé de produire leur unique album, le groupe de Benjamin Tuček et de la chanteuse Kateřina Coufalíková propose une musique psychédélique et shoegaze qui ressemble fort à un mélange entre The Telescopes, The Verve et Bark Psychosis.

8 avril 2015

Fiche artiste de Throw

Throw

La carrière de ce groupe culte est aussi étrange que prolifique, du moins, durant leur bref temps d’existence. Au début, il s’agissait d’une idée de Rob Mayes, patron du label Failsafe, qui souhaitait réunir des musiciens de studios en fonction de ses besoins et de ses chansons. Il a donc fait appel à ses amis Steve Birss (à la batterie) avec qui il avait joué au sein du groupe Dolphin dans les années 80, et Jeremy Taylor (à la guitare et au chant), lui aussi ancien proche de Birss lorsqu’il était au sein de Elevation. Les trois hommes s’accordent à dire qu’ils aiment les groupes anglais et les saturations. Très vite, les chansons de Mayes passent à la moulinette des deux autres et une alchimie se fait jour. Au lieu d’une association intéressée, on passe à un vrai groupe, qui n’hésite pas à faire des concerts ou tourner des clips vidéo (à l’esthétique absolument remarquable). Hélas, du fait des autres projets de Birss, ce dernier ne peut assurer les tournées et le groupe doit faire appel à de nombreux autres batteurs de remplacements, dont l’un devra abandonner pour burn-out et terminera à l’hôpital psychiatrique. Les derniers concerts à deux membres seulement sont difficiles et accentuent les tensions entre eux, ils ne se parlent même plus, jusqu’à ce jour fatidique où Jeremy Taylor ne se présente pas à un show. Rob Mayes décide alors de prendre les choses en main, de récupérer tout son matériel, de retourner en studio et de faire les fonds de tiroirs pour rassembler tous les singles plus quelques inédits en un ultime album. 

28 mars 2015

Readymade : The dramatic balanced

The dramatic balanced de Readymade

Date : 1997
Production : Howard Redekopp
Label : No Records

Avec un sens du recyclage inouï, ce groupe originaire de Vancouver renouvelle les codes du shoegaze, pour l’emmener sur les terres de l’electronica et du post-rock. Traitant avec une rigueur méticuleuse les arrangements et les possibilités modernes de production, Readymade mêle donc petits bruits électroniques, caisses claires et arrangements synthétiques à leurs guitares qui se posent comme des drones caressant.  
Le groupe arrive à manier des outils techniques froids (les claviers, les boites à rythme, les grésillements de guitares, les voix trafiquées au micro…) pour aboutir toujours à une musique chaleureuse. « Wayfinding » démarre par des pshuut, des plics, des ticccs, des plocs, pourtant cette voix adoucie et un peu fatiguée rassure, même si elle peut être parfois perturbée par une saturation industrielle. Readymade arrive à faire de l’émotion avec l’artificiel. Les riffs sont entrainants, joués avec assurance mais indolence, et envoutent, tant pis s’ils sont interrompus par des brisures ou recouverts de sirènes (« Of urban sprawl »), tant pis s’ils sont grésillant. Car les voix, elles, restent angéliques et émasculées.  
C’est surtout lorsque Readymade se lance dans des berceuses qu’il arrive à subjuguer par son invention et son ingéniosité. Sur « Following a typewriter to sleep »), on devine bien que tout est synthétique, des boites à rythme, au petit riff samplé qui se répète indéfiniment, aux échos de guitares tremblotants façon Loveless, en passant par la voix trafiquée et mixée pour être un peu étouffée, et malgré cela, on ne peut s’empêcher d’être saisi : c’est si tranquille, si relaxant et si beau !
Ce joyaux du shoegaze canadien est si finement travaillé qu'on dirait qu'il sort tout droit d'un rêve. C'est avec stupeur qu'on se lance à l'écoute de ces guitares saturées qui dessinent des nuages qui s'évaporent aussitôt, dans une ambiance de féérie électronique. Les membres de Readymade paraissent user de moyen si fragile que c'est à peine si la boite à rythme arrive à passer par-dessus le reste. Ainsi, « Hamburg » est une ballade adorable, à déchirer les cœurs. Avec son rythme lent, confirmé par une batterie sûre d’elle-même, et d’une basse en avant, elle berce. Puis déboule des drones parasitant, un clavier féérique et un chant céleste pour achever la capture.
De simples saturations, une simple rythmique, sont là pour tisser une toile filamenteuse où vient se déposer une voix toute douce et toute douce, car il n'y a guère d'autres mots pour désigner le degré de légèreté qu'atteignent les vocalises du groupe. L’univers de Readymade n’est pas dur comme l’acier, il est au contraire réconfortant. Certains morceaux, très longs, peuvent alors emmener l’auditeur à se perdre et à rêvasser, d’autant qu’il perd toute notion organique à quoi se raccrocher. C’est loin d’être tarabiscoté, ça prend son temps, ça peut même démarrer très lentement, comme sur le superbe « Head falls to shoulder », un peu comme une ballade slowcore, puis lorsque les claviers arrivent et que la batterie se fait un poil plus insistante, la pression artérielle augmente progressivement, on s’étonne d’adhérer avec ce chant si laconique, pourtant lorsqu’enfin arrivent les saturations, on le vit comme une libération, un apaisant paroxysme

20 mars 2015

Soon : Scintille

Scintille de Soon

Date : 1996
Production : Andjela Dutt
Label : Black Out / Mercury

Produit par Andjela Dutt, une spécialiste du shoegaze (Swervedriver, The Belltower, The Boo Radleys, Rollerskate Skinny, Submarine, The Werefrogs, elle est même conviée un temps pour participer au Loveless de My Bloody Valentine), cet album pourtant sorti sur une major se dote d’un mur du son pour doper ses mignonettes chansons pop. Le groupe italien signe des tubes destinés à conquérir les charts tout en se compliquant la tâche à grand renfort de guitares. Malgré l’esprit ouvertement pop et mignon tout plein, les déferlantes font mal aux oreilles, comme sur « Ordine » ou « Settimane », qui rappellent un peu ce qu’ont pu faire Pale Saints (lorsque Meriel Barham était aux commandes) ou Lush sur la fin.
En effet, grâce à Andjela Dutt, les influences shoegaze pointent le bout de leur nez. Exit les voix inaudibles et la torpeur mélancolique, mais derrière les saturations, les accélérations à la batterie et le son bodybuildés, Soon dévoile tout de même quelques surprises. Une pulsion à pervertir juste ce qu’il faut ses chansons, pourtant adorables et basiques de prime abord (le punk « Stasi »). Mais ce n’est qu’une apparence. Car il faut voir derrière la voix cajoleuse et enjouée d’Odette Di Maio (tout en italien), un esprit espiègle et fragile. 
A bien y réfléchir, le groupe est en réalité loin de vouloir s’épanouir dans une ambiance frivole, tout juste bonne à plaire au grand public, il souhaite avant tout sublimer une certaine vision de la beauté, en y injectant le doute. C’est ainsi que le sublime « Il fiume », démarrant pourtant avec une guitare sèche et une magnifique mélodie à la guitare, va être envahi à chaque refrain par une déferlante de gros sons, puissant et grondant.
Il faut entendre la petite Odette Di Maio chanter innocemment sur « Larva », tandis que graduellement les saturations s’accentuent. Elle continue comme si de rien n’était et se laisse envahir par cette déferlante de bruits autour d’elle, une démarche assez subversive en soi, car on aurait tendance, par facilité, à la mettre en avant. Pourtant, pour le groupe, les choses sont claires, ce qui est à l’honneur, ce sont avant tout les guitares.
C’est en étant sans cesse emballées et saturées qu’elles prennent les devants et donnent un cachet particulier à ses magnifiques morceaux que sont « O almeno sembra », où la voix aérienne de Odette fait des miracles, ou « In nessun posto », une vraie ballade romantique.
Certes, la formule reste souvent basique : couplet vindicatif, refrain apaisé et lumineux, cependant, ce (léger) mur du son perverti un tout petit peu ces chansons joyeusement dynamiques. 

27 février 2015

Teen Love Sex Doll : La Fleur

La Fleur de Teen Love Sex Doll

Date : 1995
Production : Ivo Heger
Label : Indies Records

On retrouve un son parfois minimaliste, contemplatif, un jeu éclaté dans le rythme (assez époustouflant dans la langueur et la souplesse), notamment avec les percussions, des bruits bizarroïdes parfois, qui serviront de mantra pour les trips, des riffs fantomatiques, toujours légers, une attitude nonchalante au chant et dans le jeu, déclinant vers une apologie de la drogue, une voix alanguie et flottante, aboulie soulignée à coup de laisser-aller instrumentaux, des distorsions sorties de l’espace. Tout ceci au service de chansons hypnotiques, de « Sun in you » à l’enlevé « Dandelion Tissue », en passant par le traînant « Mistress », véritable tour de force traversé de saturations.
La voix peut être très très légère, qui s’envole, tandis qu’on a toujours de très très petites mélodies à la guitare, qui dialoguent, pour des intros psychédéliques, avec quelques percussions, des cymbales, des guitares joués comme des harpes, une entrée en matière pour un monde de volutes, de champignons et de délires (« Rough Intermezzo »). Ainsi les distorsions et autre réverb arrivent toujours de loin, montent en puissance et finissent par arriver, mais comme si ils émergeaient d’un nuage, on dirait toujours une sorte de symphonie nébuleuse, les voix sont fatigués, légères, enfumés. Des symphonies basées sur une alternance (comme sur « All your skies is blue » et sa batterie qui roule des caisses, ces volutes de guitares) entre moments reposés, élastiques, légers, et des guitares féériques, plus cosmiques. On finit par aboutir à des échos de rêve, un aperçu du merveilleux. Parfois compliqué à suivre. Comme sur l’avant-gardiste « Gauloise Cigarette », avec ces cris, ces bruits blancs, ces chants féminins mystiques, ces coups de batterie dans le vide.
Bref, voilà une vraie curiosité, remplie d’harmonies magiques et de boucans expérimentaux, tout en faisant preuve d’une langueur psychotrope digne de cette époque tchèque. On se plonge à corps perdu dans un morceau comme « Pigs in heaven », splendide, avec ce dialogue voix masculine et voix féminines, presque d’une teneur angélique, si ce n’était en réalité sous le coup de la paresse. Le travail à la batterie, à la limite du jazz, est magnifique. Quant aux guitares, soit féériques, soit saturées pour un mur du son imposant, elles transcendent. C’est un délice dans lequel il est bon de se laisser aller, avec ou sans drogue...

29 janvier 2015

Throw : Rememory

Rememory de Throw

Date : 1995
Production : Rob Mayes
Label : Failsafe Records

Cet album aurait pu tout simplement ne jamais paraître et pourtant il s’agit probablement d’un des plus beaux de ce label minuscule. Preuve que la Nouvelle-Zélande possédait une scène indépendante fertile.
Car au moment de son enregistrement, le groupe n’existait déjà plus ! En effet, seul Rob Mayes, le fondateur, est resté aux manettes de son propre studio et a récupéré les cassettes précédentes et les chutes pour monter un album complet au mixage !
Et sur celui-ci, on tombe sur de véritables tubes, aux mélodies faciles et très romantiques. Ce qui caractérise le groupe, c’est son émotion à fleur de peau (on dirait de l’émo parfois, comme sur « Nowhere Near »), marqué par des arpèges magnifiques (les riffs byrdiens de « Wishes from the heart »), des déferlantes de saturations (le rapide « All different things »), une basse à se damner (derrière les guitares sèches et le mur du son enivrant de « Honeyblonde ») et une voix douce et sensible (toutes les chansons). On dirait entendre Revolver ou Straitjacket Fits. C’est époustouflant de constater à quel point toutes ces chansons sont emballantes et à quel point peu de gens les connaissent. Et forcément le groupe est expert en slow qui tue, celui pour emballer et celui pour rêver, comme sur le sensuel « Falling inside me », avec la divine Rebekah Davies au chant.

6 janvier 2015

Astreal : Ouijablush

Ouijablush de Astreal

Date : 1997
Production : Muhammad Alkhatib
Label : Pony Canyon

Un univers artificiel, dessiné d'entrée par des distorsions qui surgissent progressivement du silence, puis un rythme en mode turbo jaillit subitement et des saturations dévalent (« Just a dream »). On dirait une ambiance de boite de nuit à l’époque où le trance goa faisait fureur en Asie. Seulement la voix est là, savoureuse, calme, reposée et ensorcelante. Melissa Lim est celle qui confère toute la magie à la musique cosmique d’Astreal. Elle chante toujours de façon si douce quoiqu’il arrive. Elle devient alors une figure centrale, autour de laquelle toutes les mélodies gravitent, sorte de référence entre fille de l’air et incarnation mystique.  
Le groupe convoque les astuces synthétiques, beat electro, sample et clavier, pour accélérer le tempo mais l’évanescence reste de mise. « Stay Awake », que John Peel programmera lors de ses émissions, est une adorable chanson typée indie pop, évoquant Talulah Gosh ou Heavenly, mais avec des beat programmés assez rapides. Même chose avec « Vir-Uno », où les ordinateurs permettent d’accélérer le rythme et de s’offrir des saturations constantes. A chaque fois, Melissa Lim rayonne de par sa majesté. C'est tous nos sens qui se noient dans cette (fausse) innocence vaporeuse.
Féérique, spatiale et pleine d'emphase raffinée, la musique de cette formation culte de Singapour (qui s’est reformée vingt ans plus tard !) met en scène une sorte d'apologie de la rêverie. Avec les nappes grésillantes du splendide « Wait » et son petit riff entêtant qui appelle à s’évader, on stoppe tout blocage, on élimine tout ce qui est toxique et on décolle vers un nouvel espace apaisé et poétique, emporté par les chants, masculins et féminins, tranquilles et sucrés.  
La mollesse est d’autres fois à son comble tout comme le raffinement. Les titres nuageux et ensorcelants sont remplis de claviers atmosphériques et d'instruments dessinés comme des volutes complexes et étranges (le splendide « Barbed Wire »). Influencé par la dream-pop de Pale Saints ou Slowdive, le groupe délivre une vision très personnelle de la beauté. Quelque chose d'infiniment profond comme d'infiniment apaisant aussi. « To the velvet » offre un tryptique basse / guitare féérique / guitare sèche à la beauté reposante, comme sait aussi le faire Sugar Plant. Tandis que « June 12 » garde un rythme lent avant que des tempêtes sonores viennent le secouer.
Sublimée par la voix sylphidienne et angélique de Melissa Lim, la musique d’Astreal est avant tout un hommage, authentique, à l’espoir. L’album se conclut d’ailleurs sur une note plus insouciante et juvénile. « Take my hand », plus frivole, est basé sur un clavier cheap, qui rappelle les années 80, et dévoile des mélodies délicates et menues, presque joyeuses. On dirait un morceau twee. Derrière la volonté d’évasion et de contemplation d’espaces nouveaux, il y a avant tout cet optimisme qui habite le groupe.