14 février 2018

Salon Music : M*A*S*H

M*A*S*H de Salon Music 

Date : 1995
Production : Zin Yoshida
Label : Trattoria

Volontiers avant-garde et dans un esprit d’évasion artificielle, le couple japonais va, à la suite du mouvement Shibuya-kei, ajouter quelques influences shoegaze à son rock ambient, qui conserve de son goût pour la sensualité quelques réminiscences. Dans un souci de sonner tout à la fois étrange et enivrant, on surprend de ci, de là, quelques samples reprenant l’indie-dance (le rigolo « Pop life »), un clavier omniprésent (« Falling Rain », très EMF dans son style), des percussions indiennes (« Muddy Sunshine »), une musique lounge, pop de chambre, voire lo-fi (les guitares déglinguées de « Is it today ? »). Experts en programmation, on sent que Hitomi Takenaka et Zin Yoshida se sont amusés à user de toutes les techniques possibles pour imiter les groupes à la mode en Angleterre.
Le rythme est globalement indolent, pour insuffler une sorte de torpeur à l’auditeur et l’emmener vers un état à la fois relaxant et déconcertant (« Nagisa Nite »). Salon Music, c’est un nouveau monde qui se dessine, capricieux et vaguement aérien. On pense à My Bloody Valentine, Stereolab, Seefeel ou Saint-Etienne.
Les chansons, même si elles peuvent être surprenantes, sont souvent basées sur une construction autour de boucles de guitares tranquilles, lancinantes, de rythmes programmés sur mode invariable, sur lesquelles vient se déposer comme du velours la voix grave de Hitomi Takenada. Elle ne cessera de souffler, de susurrer, de lâcher des râles d’une légèreté confondante et sensuelle. Sa personnalité envoutante apporte la chaleur hypnotique aux morceaux. La répétition hypnotique est le maître mot de cet album, dans une veine influencée par le kautrock et l’ambient, mais qui reste feutré, doux et presque enchanteur de par les superbes parties de guitares noisy. Que dire de morceaux comme « Wanna be tied », gorgé de saturations, de claviers féériques, rythmé par des beats ambient, et dont la voix est d’une douceur telle qu’on croirait pouvoir s’y enfoncer ? Et de « Who just can’t be happy ? », hymne shoegaze, qui n’est autre qu’une nappe continue de guitares bruyantes, où Hitomi Takenada susurre lentement, comme à l’oreille, ses paroles sibyllines ?
Cet album apparaît comme une véritable bulle de fantaisie flashy et apaisée, à l'image de la pochette mythique. Un recueil de délicates chansons pour un album incroyable, brillant et arty, qui allait confirmer une carrière immensément respectée.

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