21 février 2008

Lucie Vacarme : Milky Way

Milky Way de Lucie Vacarme

Sortie : 1992
Produit par Michel Cloup
Label : Lithium

On peut vouloir faire les crétins sur scène, s'abrutir à laisser couler les distorsions, rien n'empêche d'avoir malgré tout un sens artistique et de posséder une grande aisance. Cet album en est la preuve. Les guitares bouillonnent comme jamais, crachent et exultent, ça part dans tous les sens, c’est un concours de celui qui fera le plus de bruits, mais pourtant il se dégage une incroyable maîtrise technique. 
Étonnant d'ailleurs que cet album ait été à ce point oublié. Alors bien-sûr, on rétorquera "mais si ! bien-sûr, je connais ! il y a Michel Cloup qui joue dans ce groupe, et tout de même Michel Cloup, ce n'est pas rien, Experience, Diabologum, c'est culte !". Certes, mais qui se souvient qu'auparavant, avec Lucie Vacarme, il a participé à un des plus grands albums shoegaze français ? Peu de monde. 
Comme si le shoegaze en France, ça n'avait jamais existé. Dans la tête de la plupart des gens, le shoegaze, un genre aussi futile et enfantin, ne peut pas avoir accouché de synthèses expérimentales et intellectuelles par la suite. Et pourtant...
Et pourtant avec Lucie Vacarme, Michel Cloup et les siens s'amusent comme des petits fous. Des titres comme "Superstar" ou "Kelly Kiss" (avec Kim Gordon de Sonic Youth en guest star) sont survitaminés, frais, rapides et effrénés, rien de plus. Les guitares sont déformées, distordues comme tremblotantes ou mal enregistrées, elles peuvent excéder dans le déchaînement de violence, parfois de manière sporadique, parfois de manière continue. Avant que de temps à autre, ça ne ralentisse, pour qu'on puisse distinguer le voix, douce, fatiguée et négligée. C'est une chance d'avoir un tel album et c'est une honte que personne ne s'en rende compte !
Alors que les délires étaient parfois difficiles à suivre sur leur premier maxi, ici, on sent davantage de portance et de poussée vers les mélodies. C'est plus chaleureux, plus lumineux, plus fluide, sans pourtant qu'il y ait moins de bruits, bien au contraire. D'ailleurs, les guitares peuvent vrombir  devenir grasses, évoquant les débuts des Smashing Pumpkins, à l'époque du méconnu (et superbe) Gish, comme sur "Souffle incandescent", superbe.
On sent que les musiciens ont pris en maturité, capables de signer quelques uns des plus beaux morceaux shoegaze, qu'ils veulent avant tout partager leur plaisir et leur passion, plutôt que de se cantonner dans des élucubrations stériles. La production, avenante, bouillante et surprenante, peut aboutir à des résultats, tels que "Rien n'a d'importance", très distordu, un peu punk, mais évoquant fortement My Bloody Valentine, ou encore  "Du caramel roux", morceau génial où l'intro lente évoque par contre presque du Slint et le post-hardcore à venir.
Malgré tout, le sens de l'expérimental subsiste toujours. Avec un peu plus de discernement peut-être qu'à leur tout début, les membres toulousains démontrent que la saturation shoegaze n'est pas qu'un plaisir futile, il est aussi une volonté de se démarquer. Preuve en est avec "Massacrer le temps", ballade plutôt bizarre, massacrée, saturée, au texte surréaliste et au chant passablement faux. Ou encore ce morceau fleuve de près de douze minutes ("Longue vie"), compliqué et presque exténuant.
Alors on pourra toujours reprocher à ces jeunes-là d'avoir voulu faire du bruit pour se prendre la tête, de n'avoir pas faciliter l'écoute ou de s'être inscrit en contre-pied des chanteurs à texte, spécialité si française, mais, franchement, lorsqu'on tombe sur un morceau aussi divin que "Immobile", que demander de plus ? Une intro tout en tension, presque insoutenable de plaisir, puis une surcharge instrumentale, un apport des guitares sèches et des tambourins, c'est un pur régal ! On dirait du Boo Radleys, c'est dire !

5 commentaires:

  1. Ça continue?

    En tous cas votre envie d'écrire vous a trahi.

    Merci pour tout.

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  2. exact cher lecteur !

    en réalité, je peaufine, je passe mon temps à faire des recherches, à rencontrer des gens, je réécris.

    j'espère que tout ces efforts vous plairont.

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  3. Ou peut on trouver cet album ? J'ai beau scruté internet...
    heureux de voir que le projet continue. ( et sinon, vous intéressez vous à " la nouvelle vague" shoegaze avec des groupes tels que Ringo Deathstarr , The Horrors, Toy , Autolux ou DIIV ? )

    Merci et bonne continuation !

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  4. Bonjour , ou peut-on se procurer cet album ?

    Merci pour tout !

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  5. Des nouvelles de l'éventuelle sortie du livre?

    Toujours pas le projet d'écrire un blog sur la scène Shoegaze actuelle?

    Content que ca continue en tous cas !

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